BIJOUX
INSPIRATION
Le spinelle, souvent confondu avec le rubis, est une pierre précieuse d’une beauté exceptionnelle. Utilisé principalement en joaillerie, il a longtemps été sous-estimé et mal compris. Pendant des siècles, il a réussi à tromper même les plus grands experts, se faisant passer pour un rubis en raison de sa couleur rouge intense et de son éclat vitreux. Aujourd’hui, il est temps de reconnaître sa véritable valeur et de célébrer sa beauté unique.
Le spinelle tire son nom du latin spina, qui signifie "épine", en référence à la forme pointue de ses cristaux. Certains pensent que son nom dérive du grec spinos, qui signifie "étincelle", évoquant ainsi la brillance et la luminosité de cette pierre précieuse. Ce minéral appartient au groupe des oxydes et cristallise dans le système cubique, ce qui lui confère souvent une apparence bien formée et symétrique. Il présente une dureté de 7,5 à 8 sur l’échelle de Mohs, ce qui le rend relativement résistant aux rayures et adapté à un usage en bijouterie.
Le spinelle est un minéral fascinant qui se forme dans une variété de conditions géologiques. On le trouve principalement dans les roches calcaires métamorphiques, telles que le marbre, où il résulte de la transformation de minéraux riches en aluminium sous l’effet de la chaleur et de la pression. Il est souvent associé à d’autres gemmes comme le corindon (rubis et saphir) et peut être découvert dans des gisements alluvionnaires où l’érosion a libéré les cristaux de leur matrice rocheuse. Le spinelle peut également se former dans des environnements ignés, notamment dans certaines pegmatites et péridotites, où il cristallise à partir du magma. Fait remarquable, des traces de spinelle ont été identifiées dans des météorites et des échantillons lunaires rapportés par les missions Apollo, témoignant de sa présence dans des environnements extraterrestres.
D’un point de vue chimique, le spinelle est un oxyde d’aluminium et de magnésium (MgAl₂O₄), mais il peut contenir des substitutions d’autres éléments comme le fer, le chrome, le cobalt ou le vanadium. Ces impuretés influencent directement sa couleur, lui conférant une large palette chromatique :
Le spinelle a été décrit scientifiquement pour la première fois en 1546 par Georg Bauer, un éminent minéralogiste et métallurgiste allemand, plus connu sous le nom de Georgius Agricola. Ce dernier est souvent considéré comme le père de la minéralogie moderne. Son travail a jeté les bases de la science des minéraux et de la géologie, et sa description du spinelle a contribué à une meilleure compréhension de la diversité minéralogique. Cependant, ce n’est qu’au XVIIIe siècle que le spinelle a été définitivement distingué du corindon grâce aux progrès de l’analyse chimique.
Le spinelle est connu sous plusieurs noms, reflétant sa diversité de couleurs et de formes :
Le spinelle peut être synthétisé en laboratoire depuis la fin du XIXe siècle. Il est produit sous forme incolore ou colorée grâce à des procédés comme la fusion à la flamme ou la méthode de Verneuil. Ces spinelles synthétiques sont parfois utilisés en joaillerie comme alternatives aux gemmes naturelles. On trouve également des variétés synthétiques commercialisées sous des noms spécifiques, comme le rozircon pour le spinelle rose, le saphir blanc (bien que ce terme soit désormais interdit en raison de sa confusion avec le saphir naturel) pour le spinel translucide, ou encore des spinelles teintés en bleu imitant le saphir. Toutefois, ces appellations, comme strongite, sont aujourd’hui réglementées afin d’éviter toute confusion avec les pierres naturelles.
Gisement : Afghanistan, Birmanie, Thaïlande, Canada, Japon, Russie, Myanmar, Etats-Unis, Tadjikistan, France, Vietnam.
Le spinelle, en raison de ses caractéristiques similaires au rubis et au saphir, a souvent été confondu avec ces pierres précieuses, parfois de manière intentionnelle pour tromper, parfois par erreur. En conséquence, il a souvent été utilisé à la place du rubis ou du saphir dans des pièces royales ou ecclésiastiques, ce qui a contribué à sa confusion et à son manque de mention dans les textes historiques. Malgré sa beauté et sa valeur, le spinelle a été relégué à l’ombre du rubis et du saphir dans les récits historiques, mais son importance dans l’histoire de la joaillerie et de la gemmologie ne peut être ignorée.
La confusion entre le spinelle et le rubis a perduré jusqu’au XVIIIe siècle, avant que la gemmologie moderne ne permette de différencier les deux minéraux grâce à leur composition chimique et leur structure cristalline. Contrairement au rubis, qui est un oxyde d’aluminium pur contenant du chrome, le spinelle est un oxyde mixte de magnésium et d’aluminium. Ce n’est qu’avec le développement des méthodes scientifiques d’analyse, comme la spectroscopie et l’étude des indices de réfraction, que la distinction a été clairement établie.
Le spinelle a été bien identifié dans l’Antiquité indienne, où il était connu sous le nom de "diamant rouge". Il était considéré comme un symbole de courage et de force et était souvent porté par les guerriers de la caste des Kshatriyas, qui étaient chargés de protéger la société et de défendre la justice. Le spinelle rouge était également associé à la protection contre les maladies et les mauvais esprits et était souvent porté comme talisman pour assurer la sécurité et la prospérité.
Les Romains, dans leur classification des gemmes rouges, utilisaient le terme "carbunculus" pour désigner toutes ces pierres précieuses. Ils attribuaient à ces gemmes des vertus similaires, les considérant comme des talismans de courage et de protection contre les blessures. Ils croyaient également que ces pierres pouvaient être utilisées comme remèdes contre les hémorragies, renforçant ainsi leur réputation de pierres aux pouvoirs médicinaux.
Depuis l’époque médiévale, principalement entre 1000 et 1900, la région de l’Afghanistan, alors appelée Balascia (aujourd’hui Badakhshan), est devenue la source la plus réputée et la plus importante de "rubis". Ce spinelle d’un rouge profond, équivalent aux plus beaux rubis, est connu sous le nom de "rubis balais". Marco Polo a fait référence à cette région lors de ses voyages et a décrit les mines de spinelle. C’est de là que proviennent la plupart des joyaux qui ornent les objets depuis l’époque médiévale.
Les mines de Badakhshan étaient si réputées que les spinelles qu’elles produisaient étaient exclusivement réservés aux souverains moghols et perses. Il était courant que ces pierres soient gravées de textes en persan relatant leur propriétaire ou leur signification. Ces pierres précieuses étaient également offertes en cadeaux diplomatiques, renforçant les alliances entre les royaumes.
Le spinelle était aussi apprécié en Chine, notamment sous les dynasties Ming et Qing. Certains empereurs le considéraient comme un symbole de pouvoir et de prospérité et l’utilisaient pour orner leurs couronnes et insignes. En Asie centrale et dans l’Empire ottoman, les spinelles étaient souvent montés sur les poignées et fourreaux des épées des sultans, leur attribuant une fonction protectrice et honorifique.
Dans certaines traditions astrologiques anciennes, le spinelle rouge était associé à Mars en raison de sa couleur et de ses liens avec la force et la combativité. Il était considéré comme une pierre conférant courage et endurance aux guerriers, et on lui attribuait également des pouvoirs de régénération physique et psychique après les batailles.
Le spinelle était déjà connu dès le XIe siècle comme une pierre d’aimant, possédant des propriétés magnétiques fascinantes. Toutefois, cette propriété dépend fortement de la présence de fer dans sa composition. Certains spinelles riches en fer peuvent présenter une légère réponse magnétique, mais ils ne sont pas aussi puissants que la magnétite. L’idée qu’il ait été utilisé pour magnétiser les aiguilles de boussole mérite d’être nuancée, car les marins utilisaient surtout la magnétite pour cet usage. Cependant, dans certaines cultures, la croyance voulait que le spinelle puisse aider à l’orientation et à la prise de décisions, ce qui renforçait son association symbolique avec les navigateurs et les explorateurs.
Voici une liste non exhaustive des plus beaux exemplaires de spinelle qui ont trompé leur monde pendant de longs siècles. Ces spinelles ont été confondus avec des rubis ou des saphirs en raison de leur couleur et de leur éclat exceptionnels. Ils ont orné les couronnes et les trésors de nombreuses dynasties, devenant ainsi des joyaux emblématiques de l’histoire des grandes civilisations.
Le spinelle le plus célèbre est sans doute celui qui orne la couronne de Catherine II de Russie. Ce spinelle rouge intense, pesant plus de 400 carats, a été acquis par l’impératrice au XVIIIe siècle et est devenu un symbole de la puissance impériale russe. D’origine probablement afghane, ce joyau a été intégré au trésor des tsars et est aujourd’hui conservé au Kremlin, où il figure parmi les joyaux les plus admirés de la collection royale russe.
Le Rubis du Prince Noir, qui trône sur la couronne impériale britannique, est en réalité un spinelle de 170 carats et 5 cm de long. Ce spinelle, d’un rouge profond, est très probablement un rubis balais de Badakhshan, une région du nord de l’Afghanistan célèbre pour ses spinelles de grande qualité.
La première mention du Rubis du Prince Noir remonte au XIVe siècle en Espagne, alors divisée en plusieurs royaumes en guerre. Il aurait appartenu à Mohammed IX de Grenade, avant de tomber entre les mains d’Abu Saïd, roi musulman de la région. En 1366, Don Pedro Ier de Castille, surnommé "le Cruel", s’empara de la pierre après avoir trahi et assassiné Abu Saïd.
Contraint de fuir devant son frère Henri de Trastamare, Don Pedro trouva refuge à Bordeaux en 1366, où il demanda la protection du Prince Noir, Édouard de Woodstock, fils du roi d’Angleterre Édouard III. En échange de son soutien militaire, il lui offrit un immense trésor, comprenant le spinelle.
Le bijou réapparaît en 1415 sur le champ de bataille d’Azincourt, serti dans la couronne du roi Henri V d’Angleterre. Il aurait été directement frappé par l’épée du duc d’Alençon, mais sans être endommagé. Ce spinelle est ensuite passé entre les mains de nombreux souverains britanniques et se trouve aujourd’hui serti au sommet du diamant Cullinan II, sur la couronne impériale britannique, exposée à la Tour de Londres.
Un autre cas célèbre de confusion entre le spinelle et le rubis est celui du Rubis de Timur, ou Rubis Tamerlan, un spinelle de 361 carats.
Ce joyau provient probablement des mines de Badakhshan et fut saisi en 1398 par le conquérant Tamerlan, après son invasion de l’Inde. Il aurait fait partie d’un immense butin de guerre comprenant d’autres joyaux et trésors inestimables.
Le spinelle passa ensuite entre les mains des empereurs moghols, notamment Shah Jahan, célèbre bâtisseur du Taj Mahal. Il était monté sur son trône, aux côtés d’autres pierres précieuses légendaires.
En 1851, lors de la colonisation britannique de l’Inde, la Compagnie des Indes Orientales offrit ce joyau à la reine Victoria. Il fut alors intégré au trésor royal britannique, où il orne aujourd’hui un collier. Ce n’est qu’avec l’essor de la gemmologie moderne que l’on identifia cette pierre comme un spinelle.
Le Spinelle de Samarian est le plus grand spinelle connu, avec un poids estimé à environ 500 carats.
Ce joyau fait partie des trésors de la couronne iranienne et est l’un des joyaux les plus impressionnants au monde. Son histoire exacte reste incertaine, mais il aurait été récupéré lors de la conquête de l’Inde par le roi Nâdir Châh de Perse au XVIIIe siècle, après le pillage de Delhi en 1739. Il se trouve aujourd’hui exposé au Musée des Joyaux Nationaux de Téhéran, où il témoigne de la splendeur du patrimoine iranien.
Le Spinelle Côte-de-Bretagne est un joyau emblématique du trésor royal français.
Son histoire remonte à Marguerite de Foix (†1486), duchesse de Bretagne, qui le transmit à sa fille Anne de Bretagne. Il entra ensuite dans les possessions du roi François Ier, et fut conservé parmi les joyaux de la Couronne de France.
Au XVIIIe siècle, il fut taillé en forme de dragon, un choix symbolique renforçant son association avec la puissance royale et l’Ordre de la Toison d’Or. Il fut ensuite intégré aux insignes royaux sous Louis XV.
Aujourd’hui, le Côte-de-Bretagne est exposé au Musée du Louvre, où il est l’un des joyaux les plus admirés du patrimoine français.
Le Rubis de la Reine d’Espagne fait partie des joyaux de la couronne espagnole. Il aurait été acquis par les rois d’Espagne à une époque incertaine, probablement pendant la domination espagnole sur les territoires du Nouveau Monde et d’Asie. Contrairement aux autres spinelles célèbres, il n’a jamais été retiré du trésor royal espagnol et se trouve aujourd’hui dans les collections royales.
La Couronne de Saint-Édouard, utilisée pour le couronnement des monarques britanniques, comprend plusieurs pierres précieuses, dont un spinelle. Bien qu’il ne soit pas aussi célèbre que le Rubis du Prince Noir, il témoigne de l’usage fréquent du spinelle dans les bijoux royaux avant l’avènement de la gemmologie moderne.
En dehors du spinelle de la couronne de Catherine II, un autre spinelle impressionnant figure dans le trésor impérial russe. Il aurait été offert par un marchand persan à l’empereur Paul Ier de Russie à la fin du XVIIIe siècle. Son poids et son origine restent incertains, mais il témoigne de l’attrait des tsars pour cette pierre.
L’Empire moghol possédait plusieurs spinelles impressionnants, souvent gravés de versets coraniques ou d’inscriptions en persan. Ces pierres se retrouvent aujourd’hui dispersées dans différentes collections privées et musées, notamment en Inde et en Iran. L’un des plus célèbres, connu sous le nom de "Spinelle Gravé Moghol", porte une inscription datant du règne de Jahangir (1605-1627) et pèse plus de 200 carats.
Un spinelle rouge de taille imposante figure dans la couronne des rois de Bavière, conservée dans la Trésorerie de la Résidence de Munich. Comme beaucoup d’autres, il a été initialement identifié comme un rubis avant d’être reconnu comme un spinelle au XXe siècle.
Bien que les spinelles bleus soient moins célèbres que leurs homologues rouges, leur rareté et leur éclat en ont fait des pierres de grande valeur. Ils ont souvent été confondus avec des saphirs en raison de leur teinte, mais leur structure cristalline et leur composition chimique distinctes les différencient des véritables saphirs.
Le Grand Spinelle Bleu de Russie est une pierre d’une taille exceptionnelle, qui fait partie du trésor impérial russe et a été longtemps considéré comme un saphir. Ce joyau provient probablement des mines du Sri Lanka ou du Tadjikistan. Il fut intégré aux joyaux des tsars et exposé avec d’autres pierres précieuses au Kremlin.
Plusieurs spinelles bleus ornent les joyaux de la couronne iranienne, connus comme les spinelles bleus de la couronne persane. Ces pierres, extraites des mines du Badakhshan ou du Sri Lanka, ont été longtemps assimilées à des saphirs avant d’être correctement identifiées au XXe siècle grâce aux avancées de la gemmologie.
Les empereurs moghols possédaient d’impressionnants spinelles rouges et bleus, certains gravés de versets coraniques ou de noms royaux. Certains de ces spinelles bleus ont été confondus avec des saphirs et figurent encore aujourd’hui dans des collections privées et muséales.
Durant la Renaissance et jusqu’au XIXe siècle, plusieurs bijoux européens ont intégré des spinelles bleus pensant qu’il s’agissait de saphirs. Il existe ainsi des broches, pendentifs et couronnes qui ont été plus tard réévalués comme contenant des spinelles plutôt que des saphirs.
Le spinelle est une pierre précieuse qui, selon la lithothérapie, possède plusieurs propriétés bénéfiques pour le bien-être physique, mental et émotionnel. Il est souvent considéré comme une pierre de revitalisation, favorisant la force intérieure, l’énergie et la résilience face aux épreuves de la vie.
Veuillez noter que toutes les propriétés curatives présentées pour les pierres sont recueillies auprès de diverses sources. Cette information est fournie à titre de service et ne vise pas à traiter des conditions médicales. Il est recommandé de consulter un professionnel de la santé pour des problèmes médicaux graves et de ne pas utiliser les pierres précieuses comme seul traitement.
Liste des pierres commençant par la lettre :
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